Post Mortem
Vingt – quatre ce n’était pas le chiffre porte bonheur de Didier Lombard ces derniers jours. Vingt-quatre suicides chez France Telecom et le silence de Lombard. Un silence dont les médias se sont emparés et ont transformé habilement en polémique : l’abandon, le délaissement des salariés, et l’opinion publique s’est enflammée. Elle a réagi, non pas parce que l’acte délibéré de mettre fin à sa propre vie, de se « massacrer soi même » serait un acte moralement condamnable, non pas parce que la mort de ces hommes et de ces femmes l’attriste – elle ne connait même pas leur nom – mais parce qu’elle se reconnait en eux, parce qu’ils sont toujours là finalement les liens sociaux, parce qu’elle arrive encore à se reconnaitre en autrui : le stresse au travail, la pression, les antidépresseurs, elle connait. Alors face à une idée aussi terrifiante que la mort, l’opinion publique s’indigne. La réaction du gouvernement ne se fait pas attendre : M. Darcos, ministre du travail convoque M. Lombard, ce dernier s’exprime enfin et les médias sont ravis : des propos maladroits, un management de crise pitoyable, aucune gestion de l’émotion collective, pas de compassion. Il n’a fait qu’attiser le feu de l’opinion publique et la sur-médiatisation continue. M. Darcos prend alors les choses en mains et affirme que des mesures pour lutter contre le stress et le harcèlement au travail seront prises, il va même jusqu’à dire : « Vu la pression de l’opinion publique, la transparence est une bonne solution ». Propos étonnants, ce serait désormais l’opinion publique qui déciderait de l’action du gouvernement au dépend du parlementarisme, de la démocratie et de toutes formes d’autorité politique légitime.
